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5) Interaction plasma paroi et extraction des particules et de la chaleur (p 1 - 2 - 3 - 4 - 5 - 6 - 7 )
d) Extraction de chaleur et scénarios rayonnants
Lorsque les particules du plasma suivent les lignes de champ et interceptent les parois dans la zone de bord, elles y déposent leur énergie, qui, même si elle est bien inférieure à ce qu'on rencontre au coeur du plasma, reste redoutable pour le solide (1 eV , qui correspond à l'ordre de grandeur des énergies de liaison entre atomes). Dans Tore Supra, on peut atteindre des flux thermiques de plusieurs dizaines de MW/m2 le long des lignes de champ, du même ordre de grandeur que ceux qui règnent à la surface du soleil (environ 70 MW/m2). Pour donner un ordre de grandeur, 10 MW/m2 tombant sur du carbone simple de type graphite non refroidi mènent à une élévation de température de 1000 °C en 1 seconde : autant dire que rien ne résiste bien longtemps à ces conditions !
Une première idée pour alléger la charge thermique est d'optimiser la géométrie des composants face au plasma de façon à intercepter les lignes de champ de manière rasante et d'étaler le flux incident sur une surface la plus large possible. Par exemple, le fait d'intercepter une ligne de champ avec un angle de 10° au lieu de 90° (incidence normale, situation la plus contraignante) permet d'atténuer la charge thermique d'un facteur 6.
Dans Tore Supra, machine destinée à travailler en décharges longues, un soin tout particulier a été apporté à la conception des composants face au plasma, qui sont refroidis par une circulation d'eau sous pression pour pouvoir résister à des charges thermiques intenses sur des temps longs. Comment dimensionne-t-on ces composants ? Plusieurs critères entrent en jeu. Tout d'abord, le matériau qui fait face au plasma : il faut qu'il résiste bien aux chocs thermiques, qu'il évacue au mieux la chaleur, qu'il ne pollue pas trop le plasma si il est érodé. Le carbone, mais aussi le tungstène ou le beryllium, sont de bons candidats. Ensuite, le matériau de structure, sur lequel le matériau face au plasma est assemblé et qui assure le refroidissement : là, c'est l'évacuation de chaleur qui est privilégiée, et on choisit en général des nuances de cuivre dans lequel sont usinés des canaux de refroidissement où circule de l'eau sous pression. Reste alors à optimiser l'épaisseur du matériau face au plasma. Si on veut minimiser l'élévation de température du composant, il faut le choisir le plus mince possible, afin que la chaleur diffuse le plus rapidement possible dans le matériau de structure. D'un autre côté, il faut quand même lui assurer une certaine solidité, et une durée de vie suffisante face à l'érosion par le plasma. En pratique, on arrive à un compromis autour d'une épaisseur de 1 cm. Les progrès dans les matériaux utilisés (type composite en fibre de carbone ou CFC, utilisé également dans le domaine de l'industrie spatiale) et dans les techniques des circuits de refroidissement ont ainsi permis d'élaborer des composants capables de résister en continu à 10 MW/m2. Tore Supra constitue un banc test idéal pour les technologies et les matériaux développés pour la machine de prochaine génération (la puissance injectée dans le plasma est moindre mais concentrée sur une surface plus réduite puisque la machine est plus petite : les flux de chaleur mis en jeu sont comparables).
Une fois la géométrie des composants face au plasma optimisée, une deuxième idée est d'agir sur le plasma pour réduire la charge thermique : c'est ce qu'on recherche avec les scénarios rayonnants, où on essaye d'atténuer le flux thermique concentré sur le premier composant rencontré par le plasma en créant une couche périphérique qui rayonne de la puissance uniformément autour de la machine, ce qui permet de mieux répartir la charge sur l'ensemble des composants.
Examinons par exemple les ordres de grandeur sur ITER, machine de prochaine génération. 300 MW provenant du coeur de la décharge sont à évacuer (puissance produite par les réactions de fusion et portée par les particules alphas ajoutée à la puissance extérieure couplée au plasma). Sur ces 300 MW, 100 sont rayonnés au centre de la décharge par différents processus (rayonnement Bremsstrahlung et synchrotron). Il en reste donc 200 qui parviennent au bord de la décharge, et seraient concentrés sur les plaques de divertor, qui représentent environ 10 m2 de surface : sans rayonnement, cela donnerait du 20 MW/m2. En s'appuyant sur les études réalisées dans les machines existantes, les scénarios rayonnants appliqués à ITER permettent de rayonner environ 150 MW, ce qui laisse 50 MW pour le divertor (soit 5 MW/m2 , acceptable d'un point de vue technologique) et conduit à des flux de l'ordre de 0.5 MW/m2 sur l'ensemble de la paroi de la machine. |
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