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Tous unis
pour ITER ŕ Cadarache La communauté scientifique européenne spécialiste de la fusion magnétique s'est engagée résolument depuis plusieurs années pour démontrer la possibilité de produire de l'énergie par cette voie, avant le milieu de ce sičcle. ITER, qui est une étape cruciale dans cette démarche, doit ętre engagé dans les meilleurs délais. Nous sommes convaincus que le site européen de Cadarache a les meilleurs atouts pour qu'y soit construite rapidement la machine et pour attirer les ingénieurs et scientifiques de haut niveau nécessaires ŕ cette réalisation. Nous sommes aussis convaincus que, dans la compétition en cours avec Rokkasho-Mura pour le site d'implantation, il faut tout faire pour préserver le caractčre international de la collaboration qui a prévalu jusqu'ŕ présent et pour renforcer le partenariat d'ITER dans une approche globale des recherches sur l'énergie de fusion. Pourquoi l'énergie de fusion ? C'est la perspective d'une énergie propre, abondante et sűre, disponible partout dans le monde. Elle pourrait aisément alimenter en électricité les régions les plus peuplées de la plančte. Pourquoi ITER ? Au cours des dix derničres années, les recherches sur la fusion ont atteint un tel degré de maturité dans la compréhension du comportement des plasmas (milieu dans lequel se produisent les réactions de fusion ŕ des températures voisines de celles du soleil) et dans les technologies associées qu'il est maintenant possible de faire la démonstration scientifique "grandeur nature" de cette source d'énergie. La communauté internationale est arrivée ŕ la conclusion qu'ITER est aujourd'hui la premičre priorité pour atteindre cet objectif. Les progrčs accomplis sont le fruit d'une collaboration internationale rassemblant l'Europe, le Japon, la Russie et les Etats-Unis, rejoints tout récemment par la Chine et la Corée du Sud. Dans cette aventure, c'est l'Europe qui, depuis 1958, a joué un rôle de leader grâce ŕ la coordination Euratom des actions nationales. Cette organisation a permis la construction et l'exploitation du JET, machine européenne qui a produit 16 MW de puissance de fusion en 1997. L'actuel projet ITER a été conçu par l'Europe, le Japon et la Russie et, jusqu'en 1998, par les Etats-Unis, sur un modčle dérivé de la configuration du JET. Oů construire ITER ? Un intéręt croissant pour ITER s'est manifesté sur le plan mondial, soit pour y participer, soit pour proposer l'accueil de l'expérience. Le Canada, la France, le Japon et l'Espagne ont, par exemple, offert un site pour cet accueil. En 2003, les Etats-Unis, la Chine puis la Corée ont rejoint l'Union européenne, le Japon et la Russie dans les négociations relatives ŕ sa construction et son exploitation. En novembre 2003, aprčs une négociation interne, l'UE a décidé ŕ l'unanimité de choisir Cadarache, prčs d'Aix-en-Provence, comme site candidat pour l'Europe, et l'Espagne comme site du sičge du centre de gestion des contributions européennes. Aujourd'hui, aprčs le retrait du Canada, les partenaires d'ITER ont ŕ choisir entre deux sites, Cadarache en Europe et Rokkasho-Mura au Japon. Pourquoi choisir Cadarache ? On y trouve déjŕ le plus grand centre de recherche sur l'énergie en Europe. Y sont rassemblés plus de 3 500 experts en sciences et technologies de pointe et plus de 400 spécialistes de la fusion qui travaillent sur tous ses aspects et en particulier autour du plus grand tokamak (machine utilisant un aimant pour créer un champ magnétique de confinement) supraconducteur : Tore Supra. Quel contraste avec un site isolé et dépourvu d'infrastructures de recherche ! Cela explique pourquoi les autorités européennes ont mis tant l'accent sur les bénéfices considérables que tirerait ITER d'une implantation ŕ Cadarache durant toute la vie du projet. En particulier, l'organisation ITER pourrait profiter immédiatement de l'infrastructure existante pour accueillir les scientifiques du monde entier ; elle pourrait se mettre au travail dčs le premier jour tout en maintenant complčtement son autonomie. Dans le débat actuel, quelques aspects techniques doivent ętre clarifiés : - Le transport jusqu'ŕ Cadarache des charges lourdes et encombrantes a été soigneusement étudié. La modification des routes et des ponts entre le port de Fos et Cadarache se réduira ŕ de simples aménagements d'infrastructures existantes, ŕ l'exception de l'élargissement d'un secteur de route qui court-circuitera un tunnel et qui est aussi nécessaire pour améliorer le trafic local. Le coűt et le planning de ces travaux sont maintenant connus avec précision. La solution retenue bénéficie de l'expérience acquise pour le transport de charges comparables depuis Bordeaux jusqu'ŕ Toulouse, site d'assemblage de l'avion européen A380. Le transport routier par lui-męme n'ajoute pas de risque significatif ŕ l'ensemble de l'opération qui inclut, quel que soit le site, plusieurs transferts de charge et le transport par mer. Cette observation est étayée par la comparaison des tarifs d'assurance pour chaque séquence de ce processus. - En ce qui concerne les grandes bobines magnétiques, intransportables en raison de leur taille et de leur fragilité, l'équipe internationale elle-męme a fait le choix trčs intelligent de les construire sur place. Cela permettra d'améliorer le contrôle qualité, de réduire le temps de construction, et ouvrira la perspective d'un appel d'offres plus large qui sera générateur d'économies. Une fois les bobines fabriquées, le bâtiment utilisé pour leur construction abritera le complexe cryogénique, ce qui réduira encore davantage les coűts. Une étude faite par l'industrie pour le site Cadarache a confirmé la validité de ce choix. - La sismicité de la région de Cadarache est trčs modérée au vu de la base de données trčs complčte qui est disponible. Les propriétés physiques de l'assise calcaire sont bien meilleures que celles du sous-sol de Rokkasho-Mura. La situation sismique de Cadarache ne nécessite pas de mesures lourdes pour protéger la machine et son personnel. - L'un des obstacles les plus rédhibitoires pour ITER serait d'ętre construit dans une région isolée. Tore Supra a été achevé dans les temps grâce ŕ la logistique de Cadarache, essentielle au soutien de l'équipe de projet. Le suc-cčs de JET a, lui aussi, bénéficié d'une assistance remarquable par le centre de recherche de Culham, situé ŕ proximité immédiate. Au contraire, il y a de nombreux exemples de difficultés considérables pour mener ŕ son terme un projet de recherche majeur sur un site vierge d'activités scientifiques. En tant que scientifiques et aussi responsables d'unités de recherches, il nous paraît essentiel, pour notre personnel scientifique et technique, qu'ITER soit installé dans une région ayant une longue tradition d'accueil des communautés internationales. A cet égard, la Provence nous apparaît idéale. Vers un programme mondial ? L'Europe a focalisé tous ses efforts vers le réacteur de fusion électrogčne. C'est pourquoi l'UE, plus que les autres partenaires, a soutenu le projet ITER aux plans financier et humain, depuis son origine en 1985 jusqu'ŕ sa définition complčte en 2001 et pendant la phase transitoire actuelle. Il faut également rendre hommage ŕ l'implication remarquable et constante du Japon, quoique ŕ un niveau moindre quant aux moyens mis en śuvre. C'est pourquoi, ŕ la différence du Japon (voir le point de vue de l'ambassadeur du Japon ŕ Paris, Hiroshi Hirabayashi, Le Monde du 23 janvier), l'Europe ne s'est pas engagée dans un projet supplémentaire de grande ampleur, plus ambitieux que le JET, et qui pourrait ętre construit en parallčle avec ITER. Le Japon, lui, a développé le projet NCT équipé d'aimants supraconducteurs et de parois activement refroidies. Cette machine permettrait, ŕ côté d'ITER, de tester des composants et des concepts du réacteur électrogčne dans un développement accéléré de la fusion. Les chercheurs européens sont convaincus que, dans l'intéręt du projet, les partenaires d'ITER doivent décider rapidement sa construction ŕ Cadarache. Cette décision devrait ętre accompagnée d'un engagement politique au plus haut niveau en faveur d'une approche globale de la fusion prenant en compte les besoins du programme et les capacités des partenaires. Ce programme mondial pourrait comprendre, en plus d'ITER, les développements technologiques nécessaires au réacteur (notamment une installation pour le test des matériaux) et l'exploitation commune de machines de recherche. Un tel programme intégré serait la meilleure garantie de succčs d'une entreprise qui représente un enjeu mondial pour notre sičcle. Carlos Alejaldre (Espagne), Alex Bradshaw (Allemagne), Jean Jacquinot (France), Chris Llewellyn-Smith (Angleterre), Francesco Romanelli (Italie), Paul Vandenplas (Belgique), Carlos Varandas (Portugal), chercheurs, spécialistes de la fusion, exercent des responsabilités dans le programme Euratom "fusion" |
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